Une équipe de spécialistes en immunologie nutritionnelle vient de publier un rapport expliquant la place primordiale de l'alimentation dans la lutte contre les infections virales, aux côtés des gestes barrières. Elle espère que les autorités sanitaires en tiendront compte dans leurs recommandations.
Le respect des mesures de distanciation sociale promues par divers pays contre le Covid-19, est un très bon moyen de limiter le risque d’infection. Cependant, l'expérience montre que tout le monde n'adhère pas de la même façon à ces mesures, ce qui limite leur portée. Nous ne pouvons pas non plus tous miser sur un vaccin ou un traitement efficace, car d'une part il n’en existe pas encore, et d'autre part, le COVID-19 présente probablement des taux de mutation élevés et une évolution rapide comme le virus de la grippe ce qui rend son vaccin moins efficace.
En revanche, pour le Pr Philip Calder de l'université de Southampton, « l'amélioration de notre alimentation est une mesure très simple que nous pouvons tous prendre pour aider notre corps à faire face aux infections et à limiter l'émergence de nouvelles souches de virus plus virulentes. Nous encourageons donc vivement les responsables de la santé publique à s'assurer que des stratégies nutritionnelles sont incluses dans tous leurs messages sur la manière de faire face aux infections virales ». Voici ce qu'explique et préconise ce professeur d'immunologie nutritionnelle dans son étude.
L'alimentation, un pilier du système immunitaire
L'alimentation est essentielle au bon fonctionnement du système immunitaire. Des personnes manquant de certaines vitamines (A, B6, B12, C, D, E, et B9) et oligoéléments (fer, sélénium, magnésium, cuivre, oméga-3) sont plus susceptibles d’être victimes d’infection car ces carences engendrent des défauts de fonctionnement de l’immunité adaptative et de l’immunité innée.
Selon les nutriments manquants, on peut observer de multiples dysfonctionnements notamment une altération et/ou une diminution du nombre de cellules immunitaires (lymphocytes, cytokines), un dysfonctionnement des réactions immunitaires (phagocytose, réduction des réponses des anticorps, cicatrisation des plaies).
Par exemple, un apport insuffisant en oméga-3 perturbe la réponse inflammatoire de l’organisme. En effet, les oméga-3 EPA et DHA permettent de résorber l’inflammation lorsqu’elle n’est plus nécessaire, une carence en cet acide gras essentiel entraîne un retard dans la résorption de l’inflammation.
En ce qui concerne le lien entre micronutriments et coronavirus, il a été démontré qu’une carence en vitamine D augmente le risque d'infection respiratoire. De même, la supplémentation en vitamine C réduit la durée et la gravité des infections des voies respiratoires supérieures, comme le rhume, et diminue considérablement le risque d'infection.
que manger pour soutenir son système immunitaire?
Les fruits et légumes
Pour leur richesse en micronutriments et notamment en polyphénols, les fruits et légumes doivent être au centre d’une alimentation soutenant le système immunitaire et la santé en général. En effet, les polyphénols sont des antioxydants bénéfiques pour la flore intestinale ayant des conséquences positives sur l’immunité et des effets anti-inflammatoires.
Pour profiter au maximum de ces bénéfices, il vaut mieux choisir des fruits et légumes issus de l’agriculture biologique car il y a globalement plus de polyphénols dans les végétaux non traités avec des pesticides, car ces antioxydants constituent un moyen de défense de la plante.
Les prébiotiques
Soutenir son système immunitaire, c'est aussi prendre soin de son microbiote, car 70 % de l'immunité est hébergée dans les intestins et le côlon. Les fibres sont le carburant des bactéries bénéfiques dont notre microbiote est composé. On les trouve dans les fruits et légumes, ainsi que dans les légumineuses, les céréales complètes et semi-complètes, les fruits oléagineux.
L’entretien de la flore intestinale permet de soutenir le système immunitaire, mais aussi d’améliorer tous les paramètres métaboliques qui font l’objet des déséquilibres dans plusieurs troubles comme l'obésité ou le diabète connus aujourd’hui pour aggraver l’infection au coronavirus.
Les probiotiques
Les bonnes bactéries du microbiote représentent une barrière contre les agents pathogènes. Si en leur apportant des prébiotiques, on participe à leur prolifération et à leur diversité, on peut aussi enrichir directement son microbiote via les aliments fermentés dits probiotiques : fromage, yaourt, légumes lactofermentés, kéfir, kombucha…
Les produits d’origine animale
Le Pr Calter préconise aussi la consommation de produits animaux pour un bon apport en fer, en cuivre (huître crue, bœuf) et en vitamine A (huile de foie de morue, foie animal, jaune d’œuf, beurre).
Les aliments à éviter
À tous ces précieux conseils, j'ajoute la limitation de la consommation d’aliments ultra-transformés, connus pour contenir des calories vides, riches en glucides raffinés (connus pour diminuer le système immunitaire), en sel, en graisses saturées, et en ACE en tout genre. Ces aliments sont à l’origine des déséquilibres métaboliques rencontrés dans plusieurs maladies de civilisation (obésité, diabète de type 2, hypertension…) qui représentent aujourd’hui les principaux facteurs de risques des formes graves de COVID-19.
Pour détourner les pièges de l’industrie agro-alimentaire pour vous faire consommer ces produits voici quelques conseils :
- Apprendre à reconnaître les aliments ultra-transformés
- Apprendre à lire les étiquettes
- Ne pas se fier au Nutriscore qui récompense souvent ce genre de produit, mais plutôt à la classification NOVA ou Siga (via des applications telles qu’Open Food Fact ou Scan Up)
- Se désintoxiquer de ces produits
Peut-on prendre des compléments alimentaires
Le Pr Calder n’hésite pas à conseiller des compléments alimentaires pour combler rapidement les déficits en micronutriments, notamment des compléments multivitaminés, des oméga-3 et des suppléments en vitamine B12 pour les personnes qui excluent les produits animaux de leur régime alimentaire. De plus, le professeur recommande aussi une supplémentation en vitamine C et vitamine D.
Les précautions à prendre avec les compléments alimentaires
En France, l’ANSES met en garde contre la consommation de compléments alimentaires en cette période d’épidémie de coronavirus notamment ceux contenant des plantes ayant des propriétés anti-inflammatoires : le saule, la reine-des-prés, le bouleau, le peuplier, la verge d’or, les polygalas, l’harpagophytum, les échinacées, le curcuma, la griffe du chat (appelée aussi liane du Pérou), les plantes des genres Boswellia et Commiphora (connues pour leurs gommes-oléorésines appelées respectivement "encens" et "myrrhe".