Pour une fois, une recherche très sophistiquée débouche sur une lueur d’espoir que n’importe qui peut partager.
Par Jacques Henry.
La quête de l’éternité n’en finit pas de préoccuper les scientifiques et c’est bien normal car celui qui trouvera le moyen de prévenir le vieillissement inexorable de notre corps aura touché le gros jackpot. Les travaux vont un peu dans toutes les directions et c’est bien normal aussi car les causes du vieillissement sont multiples. On a identifié le raccourcissement des télomères, ces petits morceaux d’ADN qui se trouvent à chaque extrémité des chromosomes, un peu comme les ficelles au bout d’un bon saucisson à cuire de la bonne ville de Lyon. On a accusé l’augmentation d’espèces chimiques oxydées contribuant à endommager les membranes cellulaires avec un déficit en équipement enzymatique permettant de les éliminer qui apparaît avec la vieillesse. On a également identifié une autre cause précipitant la mort des cellules, un affaiblissement de la capacité des mitochondries, ces petites centrales électriques de la cellule, à fournir de leur énergie aux cellules. Enfin, on a accusé l’accumulation de mutations au cours de la vie, c’est-à-dire au cours du renouvellement de notre stock de cellules, mutations agissant dans tous les sens, y compris vers l’apparition de cancers.
Pour tenter d’élucider l’énigme du vieillissement une équipe de biologistes de l’Université de Tsukuba à Ibaraki au Japon en liaison avec l’Institut Riken de la même ville a choisi une méthode différentielle astucieuse pour faire ressortir les différences entre des cellules "jeunes" et des cellules "vieilles". Il s’est agit d’étudier des lignées de fibroblastes établies à partir de jeunes sujets, y compris des fœtus, et de "vieux" sujets de 80 ans et plus. Le métabolisme énergétique général de huit lignées, 4 de chaque sorte, a été étudié en suivant la consommation d’oxygène des cellules car qui dit production d’énergie sous-entend consommation d’oxygène et dégagement de CO2. Dans les cellules de notre corps, ça marche comme dans une centrale électrique à charbon ou à gaz, un combustible comme du glucose est littéralement brûlé pour produire de l’ATP (adénosine-triphosphate) qui servira aux besoins en énergie de la cellule avec dégagement de CO2, celui-là même que l’on rejette en respirant.
D’emblée les premières données ont été formelles: les "vieilles" cellules respirent beaucoup moins bien que leurs homologues "jeunes". En d’autres termes, elles consomment moins d’oxygène et par voie de conséquence elles vont finir par mourir par manque d’énergie avec toutes les conséquences que cette situation suppose. Que s’est-il donc passé dans la cellule pour en arriver à ce résultat? L’équipe dirigée par le Docteur Jun-Ichi Hayashi a cherché à identifier des différences dans les mutations de l’ADN des mitochondries affectant en particulier le système impliqué dans la détoxification et la neutralisation des espèces chimiques oxydées. Ce fut un coup d’épée dans l’eau: pas de différence notoire entre les "jeunes" et les "vieux", je parle, bien sûr, des fibroblastes en culture.
L’idée inattendue du Docteur Hayashi fut de reprogrammer ces fibroblastes, en réalité de vulgaires cellules de la peau, en cellules souches multi-potentes. On sait le faire en introduisant des signaux dans la cellule à l’aide de virus porteurs de gènes qui réorientent les cellules, même âgées, en cellules embryonnaires. L’hypothèse était que si on programmait ensuite ces cellules multi-potentes pour qu’elles redeviennent des fibroblastes (on sait le faire aussi), elles devraient soit avoir gardé en mémoire leur "vieillesse" soit s’être refait une santé par ce processus. Si tel était le cas, il suffirait alors d’identifier les gènes (et l’expression de ces derniers) impliqués dans un tel artifice expérimental de rajeunissement pour avancer dans la compréhension du processus de vieillissement. Et le résultat de cette approche n’a pas du tout été celui qu’on attendait.
D’abord le vieillissement ne provient pas d’un défaut (mutations) du matériel génétique propre aux mitochondries – ces petites entités sub-cellulaires possèdent en effet un ADN spécial différent de celui du noyau cellulaire – mais bien de mutations apparues dans l’ADN du noyau cellulaire. L’identification par différence des gènes moins bien exprimés dans les "vieilles" cellules a montré que la perturbation la plus spectaculaire se situait au niveau de deux activités enzymatiques régulant la production d’un amino-acide dans la mitochondrie et pas n’importe lequel puisqu’il s’agit du membre le plus simple de cette famille de molécules essentielles à la vie, la glycine. Rien à voir avec l’arbuste grimpant du même nom et pour les aficionados de la chimie ça s’écrit NH2-CH2-COOH et ça s’appelle aussi acide amino-acétique.
Cet amino-acide est impliqué dans de nombreux processus métaboliques et si sa synthèse continue vient à décliner en raison d’une déficience de l’expression de deux des enzymes clés impliqués dans cette synthèse, alors la cellule n’a plus qu’une seule issue, mourir faute d’énergie. Ces enzymes sont codés par l’ADN du noyau et le vieillissement des mitochondries ne provient donc pas de l’ADN mitochondrial mais bien de modifications de celui du noyau cellulaire. Ces gènes ont été identifiés par un artifice expérimental consistant à mesurer le niveau d’expression de ces derniers à un instant donné et en analysant les différences d’expression entre les fibroblastes " jeunes " et les fibroblastes "vieux". Ce ne fut pas une partie de plaisir puisque le travail consista à examiner l’expression de 27958 gènes nucléaires à l’aide de microarray (bio-puces en français)!
Bref, il fallait une preuve ultime de l’implication de ces activités enzymatiques dans le vieillissement des mitochondries et ce fut très simple: réduire au silence l’expression des deux gènes identifiés, une manipulation maintenant communément utilisée en biologie moléculaire. L’équipe du Docteur Hayashi put ainsi faire vieillir prématurément des fibroblastes pourtant issus de fœtus ou de très jeunes enfants. Et si on donnait de la glycine à "manger" à ces fibroblastes dont ces gènes avaient été rendus silencieux, ils finissaient par s’habituer et rester "jeunes".
Conclusion, gavez-vous de glycine, ça ne coûte pas cher, dans les 5 dollars le kilo, c’est disponible sur internet et ce n’est pas toxique! Pour une fois, une recherche très sophistiquée débouche sur une lueur d’espoir que n’importe qui peut partager. J’avoue que je suis moi-même surpris par le résultat final de ces travaux de grande qualité publiés dans Nature et disponibles pour les curieux ici.
Source
Note: j’ajouterai pour mes lecteurs insomniaques que la glycine (3 grammes le soir) améliore la qualité du sommeil et j’avoue aussi que je suis tenté d’essayer pour mieux dormir surtout si en prime je peux rester "jeune"!
Contrepoint.org
Apports alimentaires et quantités associées
La glycine est présente dans la viande, les produits laitiers, les cacahuètes, les amandes, la levure de boulangerie ou encore le poisson et certains fruits et les fèves. Elle doit être consommée entre 500 et 2000 mg par jour mais nous venons de voir qu'il faut aller jusqu'à 3000 mg.
Synthétisée par l'organisme, la glycine est essentielle pour le fonctionnement du cerveau, mais également des muscles, de l'estomac et de la prostate.
Les quantités synthétisées par notre organisme étant insuffisante pour assurer toutes ses fonctions, il est recommandé d'en consommer entre 500 et 2000 mg par jour.
La Glycine à la dose de 6 g chez les hommes d'âge moyen, augmente la production d'hormone de croissance sans affecter les autres hormones.
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